« Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse ». Difficile de démentir pareille affirmation surtout quand elle nous vient de Musset, non ? En fait, si. Ce vers n’est clairement pas à prendre au pied de la lettre pour les commissaires d’expositions. Celle consacrée à Hokusaï au Grand Palais le démontre. Les estampes, peintures et autres encres sont magnifiques mais la muséographie dessert leur beauté.
Pas de sens de circulation clair, pas de possibilité de s’arrêter bien longtemps devant une oeuvre. Le monde nous presse à passer à la suivante, à droite, quand, dans le même temps, on nous presse à passer à la suivante, à gauche. Les oeuvres, nombreuses, se déploient à perte de vue sur les murs et les salles que l’on voit en enfilade si bien que l’on est, presque dès l’entrée, déjà frustré à l’idée de ne pouvoir tout voir et bien voir dans un temps raisonnable. Cette profusion, méritoire, enlève cependant aux oeuvres leur caractère unique et nous conduit à n’en voir aucune avec attention. « Une d’oubliée, dix de retrouvées », n’est-ce pas ? Cette abondance n’entre pas non plus en cohérence avec la lumière tamisée qui donne aux pièces exposées un caractère sacré qu’elles n’ont pourtant jamais revêtu, étant destinées principalement au divertissement et à l’amusement du plus grand nombre et de la bourgeoisie en particulier.
Faire une telle exposition en France était enfin l’occasion de connaître plus finement les culture et civilisation japonaises ou du moind, de mieux les appréhender. Or, très peu d’informations sont données sur les personnages et symboles représentés, très peu d’explications également sur les techniques et matériaux utilisés. C’est à peine, parfois, si l’on comprend qui est l’auteur des oeuvres présentées, certaines salles exposant d’autres artistes. Le parcours chronologique n’était sans doute opportun que pour les initiés qui auraient pu, d’une salle à l’autre, comprendre l’évolution ; ici, un parcours thématique semblait tout de même plus pertinent, qui permettait de voir comment un même sujet pouvait être traité différemment selon l’inspiration de l’artiste. Dans le même ordre d’idée, cette éducation à l’art que doit penser aussi un muséographe pouvait l’être à destination particulière des enfants. Hokusaï offre un univers propre à les intéresser en effet. Or, rien de ludique, d’intéractif, à l’exception de deux projections murales, n’est mis à leur disposition ou à celle de leurs parents pour les aider à pénétrer cette culture asiatique.
En un mot, exposer moins mais mieux n’eût pas été un luxe.
Exposition qui se tient au Grand Palais du 1er octobre 2014 au 18 janvier 2015.