La Belle au bois dormant

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Valentina Carrasco met en scène une Belle au bois dormant très inégale, dont les effets des quelques bonnes idées scénographiques s’estompent vite devant des ratages complets, qui, reconnaissons-le, ne lui sont pas tous imputables.

Certes, les livrets d’opéra ne sont pas réputés être d’une très grande qualité littéraire ; cependant, celui de Gian Bistolfi n’est pas même mièvre, ni convenu, mais confus et sans ligne directrice claire au point que l’on se demande, pendant la première partie du spectacle, si l’on est bien devant l’adaptation du conte de Perrault. L’intrigue peine effectivement à se mettre en place et, aussitôt arrivé au vif du sujet, on en sort trop rapidement. La Fée noire, par exemple, qui fait une entrée remarquée se venge, sans raison développée ni même apparente, de la famille royale en jetant le fameux sort à la princesse qui vient de naître. On s’éloigne ainsi un peu du conte, on le comprend, mais parfois de façon plus importante et pour verser, de surcroît, dans le mauvais goût, à l’instar de l’épisode de Mister Dollar. Était-il vraiment utile d’appuyer le sexisme inhérent au récit de Perrault en inventant une première fiancée au Prince, qui, vénale, se console promptement de l’intérêt de ce dernier pour la belle endormie en suivant l’argent dont s’auréole ce Mister Dollar ?

Tout cela eût pu être bénin si le chant avait sublimé les paroles au point de les faire oublier mais l’alchimie ne prend pas. Les chanteurs, manifestement dépourvus de pierre musico-philosophale, ne parviennent pas à transmuter le plomb en or.

Si la mise en scène séduit le spectateur grâce à de très beaux effets visuels, offerts notamment par les projections lumineuses de paysages sur des écrans ou voiles semi-opaques, qui témoignent de façon très poétique du passage du temps et créent de belles atmosphères, ou encore par les pluies de confettis d’argent, elle le rebute à cause du choix des tissus qui habitent la scène et qui font trop souvent bricolés – on pense à ceux qui servent de balançoire aux oiseaux, à ceux dont les fils qui les agitent sont par trop visibles et obèrent la magie un court temps instaurée, à celui qui forme le ruban que la Fée bleue agite sporadiquement et dont l’utilité laisse dès lors perplexe. Les couleurs de ces tissus sont du moins chatoyantes de soie et restent agréables à regarder, ce qui n’est pas le cas des costumes qui sont, eux, affreux, ceux des oiseaux, du crapaud et de la bonne fée en particulier. Quant à ceux des gens de cour, pourquoi sont-ils japonisants ? Mystère.

Il n’y a finalement que la musique d’Ottorino Respighi, bien dirigée par Vincent Monteil, qui est irréprochable. On ne s’étonne donc plus que cet opéra soit, si mal accompagné, si méconnu.

Le spectacle se joue à l’Athénée-Louis Jouvet du 17 au 22 janvier 2015.

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